academic and public programming · programmation académique e et publique
Namur, Belgium, 2014
J’étais l’organisatrice du colloque ‘LGBTQI dans la recherche et la production culturelle’ des CHEFF qui avait lieu le samedi 26 avril 2014 à l’Université de Namur dans le but de réunir autour d’un même événement chercheur•se•s, étudiant•e•s, militant•e•s et citoyen•ne•s et mettre en avant la recherche et les productions culturelles comme des instruments de la citoyenneté responsable, active, critique et solidaire.
“Ce colloque exposera et proposera un débat sur l’ancrage structurel des études de genre dans les universités, présentera des travaux dans plusieurs disciplines (histoire, cinéma, politique, droit, média, sociologie, arts, santé publique, développement) lors d’ateliers, y compris des recherches récompensées par le Prix Delor, proposera des interventions sur des politisations à l’étranger (Russie, Cameroun, Israël) et se terminera par un keynote de Karine Espineira (Observatoire des Transidentités) sur l’usage des savoirs situés. Cette première édition mettra également l’accent sur les représentations, notamment audiovisuelles.”

PROGRAMME
| 9h30-10h : Accueil, inscriptions
• FACULTÉ DE DROIT (Rempart de la Vierge 5)
| 10h-10h45 : Séance inaugurale
– Pauline B. Lomami (CHEFF): Allocution d’ouverture
– Nathalie Grandjean et Anna Safuta (Bureau de Grabuges): Pourquoi les études de genre et des sexualités comptent et combien il est important d’en assurer la transmission
| 11h-12h : Table ronde : Ancrage des études de genre en Fédération Wallonie-Bruxelles
– Nathalie Grandjean (UNamur), Julie Carlier (UGent), Alexandra Adriaenssens (Direction de l’Egalité des Chances de la Fédération Wallonie-Bruxelles)
* Animation et modération : Catherine Wallemacq (Sophia)
• FACULTÉ DES SCIENCES ÉCONOMIQUES, SOCIALES ET DE GESTION (Rempart de la Vierge 8)
| 12h-13h : Lunch (offert)
Ateliers
| 13h-14h : Atelier #1
•• Femmes, lesbiennes, queers: pouvoir et représentation
– Sevara Irgacheva: La déconstruction de l’hétéronormativité à travers la réappropriation des pratiques sexuelles dans les pornographies queers. Exemples de « Crash Pad » et « Nostalgia »
– Barbara Dupont: Grey’s Anatomy et empowerment féminin
* Modération: Sarah Sepulchre (Sophia)
| 14h-14h40 : Ateliers #2 (2 ateliers en parallèle)
•• Oriane Todts (Prix Delor 2010-2011): Le droit à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre : un droit fondamental ?
* Modération: Irène Kaufer (militante féministe)
•• Mélissa Gonay: Les HSH dans les programmes de lutte contre le VIH/SIDA au Cameroun
* Modération: Patrick Awondo (IHEID)
| 14h40-15h: Pause
| 15h-16h : Ateliers #3 (2 ateliers en parallèle)
•• Homosexualités et représentations audiovisuelles
– Amélie Roucloux: Regards croisés sur l’homosexualité dans le cinéma des années 1960 à 1971
– Sabri Derinoz: La représentation de l’homosexualité dans les médias de la Fédération Wallonie-Bruxelles
* Modération: Sarah Sepulchre (Sophia)
•• 19ème siècle, genres et sexes
– Antoine Defeyt: Des dandys au prisme du masculin. Gender trouble ?
– Julie De Ganck: Corps mensongers et apparences trompeuses, ou la science à la rescousse des catégories sociales de sexe
* Modération: Stavroula Giannelis (historienne)
| 16h-16h30 : Pause café et petite restauration (offert)
| 16h30-18h : Plénière
•• Horizons et politisations
– Vincent Palliez (Prix Delor 2012-2013): Un pied dehors, un pied dedans – Diversité des rapports à l’Etat de la militance gaie et lesbienne en Israël
– Patrick Awondo (IHEID): Le Cameroun: un paradigme de la politisation du Genre et de l’homosexualité en Afrique Postcoloniale.
– Arthur Clech (EHESS): Les homosexuels en question de la Russie soviétique à la Russie d’aujourd’hui (1981-2014) : des « dissidents » sexuels ?
* Modération : Bruno Selun (Intergroupe LGBT au Parlement européen)
| 18h-18h20 : Pause
| 18h20-18h30 : Présentation des CHEFF
– Pauline Lomami (CHEFF)
| 18h30-19h30: Keynotes
•• Karine Espineira (Université de Nice et Observatoire des Transidentités)
Usages des savoirs-situés dans la recherche. Transidentité : inégalités de la représentation et de la médiatisation.
*Modération: Londé Ngosso (Genres Pluriels)
| 19h30 : Verre de clôture (offert)
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Séance inaugurale • 10h-10h45
Allocution d’ouverture
Pauline Lomami · Présidente des CHEFF
Accueil, introduction et présentation du colloque et ses objectifs académiques, politiques et militants.
Pourquoi les études de genre et des sexualités comptent et combien il est important d’en assurer la transmission
Nathalie Grandjean et Anna Safuta · Bureau de Grabuges
Le ‘genre’ est à la fois un outil méthodologique, une approche de recherche et un vaste champ d’étude. Il permet de penser et expliquer les différences et inégalités sexuées en réfutant l’argument biologique. Les études de genre et sur les sexualités sont un immense champ de recherche interdisciplinaire, dynamique et transversal, mais qui peine à être visibilisé comme tel en Fédération Wallonie-Bruxelles. Pourtant, assurer la transmission de ce champ, tant dans les enseignements que dans la recherche, est primordial si nous voulons une citoyenneté plus soucieuse de l’égalité de genre et des droits des personnes LGBTQI.
Les CHEFF, organisateurs du colloque, sont une fédération étudiante LGBTQI et une organisation de jeunesse créée pour et par les jeunes qui fédère des étudiant·e·s et jeunes lesbiennes, gays, bisexuel·le·s, trans, queers et intersexes (LGBTQI) de Belgique francophone. Les CHEFF sont présents sur le terrain via cinq cercles estudiantins (CHE) à Bruxelles, Liège, Namur, Mons et Louvain-la-Neuve. Ses missions portent sur les thématiques LGBTQI et ont pour objectifs de sensibiliser le public, de favoriser la sociabilisation des jeunes et de discuter et collaborer avec les acteurs·trices du monde associatif, militant, académique et politique.
Grabuges est le groupe belge associatif et interuniversitaire en études féministes, de genre et sur les sexualités. Par ses actions, il soutient l’intégration du genre et d’une perspective féministe dans les travaux de recherches et aide à l’application des théories féministes ainsi qu’à répondre aux questions liées à l’interdisciplinarité qu’elles supposent. Ses rencontres permettent un réseau, la réflexion méthodologique transdisciplinaire, le renforcement de la production de savoir ainsi que l’échange et partage des réflexions et outils méthodologiques pour les mémorant·e·s, doctorant·e·s, chercheur·e·s.
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Table ronde • 11h-12h
Ancrage des études de genre dans l’enseignement supérieur
Cette table ronde consacrée à l’institutionnalisation des études de genre en Belgique donnera la parole à différentes actrices académiques, politiques et issues du monde associatif qui travaillent activement à l’ancrage structurel de ces études dans l’enseignement supérieur en Belgique.
Elle se penchera sur l’évolution de la situation au cours de ces dernières années et elle identifiera les enjeux et les obstacles. Comment un master en genre et diversité a-t-il pu être créé en Flandre et quels sont les perspectives et les blocages en Fédération Wallonie-Bruxelles ? Comment penser non seulement l’enseignement des études de genre, mais aussi la valorisation et la promotion de la recherche en genre ? Faut-il articuler ce travail avec les actions pour combattre les inégalités dans les universités ? Au-delà des universités, comment penser l’enseignement du genre dans les hautes écoles et à tous les niveaux du parcours scolaire ?
Après une revue de l’histoire de l’institutionnalisation des études de genre en Belgique et le rôle qu’y a joué Sophia et l’associatif ainsi qu’un retour sur l’étude de faisabilité pour un master en études de genre (Sophia) et les éléments importants du master flamand, les intervenantes s’exprimeront sur leurs propres expériences, que ce soit les programmes et activités mises en place en Flandre, l’institutionnalisation en vue d’un master francophone et les soutiens politiques pour l’enseignement du genre à tous les niveaux. Nous tenterons ainsi de comprendre et déterminer l’intérêt de défendre l’institutionnalisation des études de genre, l’avenir à envisager et les éléments et facteurs à favoriser pour faire avancer les choses.
Animation :
• Catherine Wallemacq · Sophia, réseau belge des études de genre
Intervenantes :
• Alexandra Adriaenssens · Direction de l’Egalité des chances, Fédération Wallonie-Bruxelles
• Nathalie Grandjean · Université de Namur
• Julie Carlier · Université de Gand
Sophia, réseau belge des études de genre,est une association bilingue qui a pour mission de promouvoir et développer les recherches et enseignements féministes et sur les femmes dans notre pays, d’insister sur leur pertinence sur le plan scientifique, de montrer leur intérêt pour élaborer des politiques favorables aux femmes. Pour ce faire, Sophia veille à jeter des ponts entre chercheur-e-s travaillant dans des centres universitaires et autres et à faire le lien entre le mouvement des femmes et le monde scientifique. Tout ceci au-delà des communautés linguistiques que Sophia cherche à rapprocher.
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Ateliers • 13h-16h30
Atelier #1 · 13h-14h
• Femmes, lesbiennes, queers : pouvoir et représentation
La déconstruction de l’hétéronormativité à travers la réappropriation des pratiques sexuelles dans les pornographies queers – Exemples de « Crash Pad » et « Nostalgia »
Sevara Irgacheva
Par l’observation des pornographies féministes et queers et des dynamiques misent en place, Sevara Irgacheva montrera comment les réalisatrices ne cherchent pas qu’à parler de la sexualité féminine mais également à avoir une approche différente des rapports de pouvoir, qui dans un système classique se résume à un masculin forcément dominant et un féminin forcement soumis, et tentent la représentation des identités sexuelles en dehors du système binaire. Dans cet exposé, Crash Pad et Nostalgia serviront d’exemples.
Grey’s Anatomy et empowerment féminin
Barbara Dupont
Barbara Dupont distinguera et analysera les différents facteurs qui font de Grey’s Anatomy un exemple notoire d’empowerment féminin par des éléments tels que la surreprésentation des femmes dans le monde de la chirurgie ou des illustrations constructives de la conciliation carrière/famille et comment cette série télévisée répond souvent de façon particulièrement positive aux impasses et aux enjeux posés par le courant postféministe actuel.
· Modération : Sarah Sepulchre • SOPHIA et Université Catholique de Louvain – Institut Langage et Communication
Ateliers #2 · 14h-14h40
2 ateliers en parallèle
• Atelier #2A
Le droit à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre : un droit fondamental ?
Oriane Todts (Prix Delor 2010-2011)
Oriane Todts visera à répondre à trois questions. Tout d’abord, dans l’état actuel du droit et de lege lata, le droit à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre peut-il être considéré comme un droit fondamental ? Si non, devrait-il en être un ? Enfin, s’il n’existe pas un tel droit fondamental alors que cela serait souhaitable, comment utiliser les outils juridiques existant pour en consacrer un ? Elle conclura que le droit à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre est encore limité au niveau de la protection qu’il offre de la vie familiale et au niveau des personnes auxquelles il s’applique.
· Modération et discussion : Irène Kauffer • Militante lesbienne et féministe
• Atelier #2B
Les HSH* dans les programmes de lutte contre le VIH/SIDA au Cameroun
Mélissa Gonay
Mélissa Gonay analysera la mobilisation et l’intégration de la population homosexuelle dans les programmes de lutte contre le VIH/SIDA 2005- 2011 au Cameroun. Elle contextualisera la question homosexuelle et ensuite la problématique du VIH/SIDA au Cameroun. De plus, la vulnérabilité de la double stigmatisation (homosexuel et séropositif) sera abordée. 3 acteurs ainsi que leurs rôles, missions et positions et divergences sur l’homosexualité dans la lutte contre le VIH seront développés : le gouvernement camerounais via le comité national de lutte contre le Sida (CNLS), l’ONUSIDA et l’association Alternatives-Cameroun.
· Modération et discussion : Patrick Awondo • Institut des Hautes Etudes Internationales et du Développement et consultant en santé internationale
Patrick Awondo a travaillé sur les femmes, travailleur·se·s du sexe et homosexuel·le·s ainsi que leur mobilisations collectives en ce qui concerne le VIH dans différents pays francophones d’Afrique y compris le Cameroun et pourra donc apporter une actualisation lors de cet atelier.
*Hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes
Ateliers #3 · 15h-16h
2 ateliers en parallèle
• Atelier #3A · Homosexualités et représentations audiovisuelles
Regards croisés sur l’homosexualité dans le cinéma des années 1960 à 1971
Amélie Roucloux
Par le croisement de deux types de discours distincts, les blogs gays et lesbiens d’aujourd’hui et les revues de cinéma françaises et belges de l’époque, Amélie Roucloux envisagera l’homosexualité au cinéma des années 1960 à 1971. Elle révèlera toute une série de tensions dans les sociétés françaises et belges qui entraînent des changements dans celles-ci. Ainsi seront retracés ces changements qui, même s’ils ne sont pas aussi influents qu’aux Etats-Unis, permettent d’annoncer un renouveau quant à la place de l’homosexualité dans ces sociétés.
La représentation de l’homosexualité dans les médias de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Sabri Derinoz
Sabri Derinoz présentera les résultats d’une première étude sur les stéréotypes liés à l’orientation sexuelle véhiculés par les programmes de télé et de radio plébiscités par les jeunes de 12 à 30 ans de la Fédération Wallonie-Bruxelles effectuée pour le Conseil Supérieur Audiovisuel. Sabri Dernioz nous expliquera que deux éléments transversaux caractérisent encore le traitement de l’homosexualité : la récurrence de l’humour et le mode de l’isolement. Cette étude est une contribution au plan diversité-égalité dans les médias lancé en 2010.
· Modération : Sarah Sepulchre • SOPHIA et Université Catholique de Louvain – Institut Langage et Communication
• Atelier #3B · 19ème siècle, genres et sexes
Des dandys au prisme du masculin. Gender trouble ?
Antoine Defeyt
Figure incontournable de la société du XIXe siècle, le dandy résiste encore et toujours à toute forme de catégorisation normative, cela y compris en sa qualité d’être sexué. En effet, les sources écrites évoquent de façon récurrente « la schizophrénie du genre » comme apanage de ses représentants. Antoine Defeyt confrontera cette assertion aux sources non-écrites que sont les portraits au travers les médias de la peinture, de la photographie et de la caricature et également au travers trois figures emblématiques du dandysme : Oscar Wilde, Charles Baudelaire et Jules Barbey d’Aurevilly.
Corps mensongers et apparences trompeuses, ou la science à la rescousse des catégories sociales de sexe
Julie De Ganck
Les hermaphrodites – terme médical utilisé jusqu’il y a peu en médecine – et les personnes ayant des organes génitaux atypiques furent étudiés par les médecins durant tout le 19ème siècle pour comprendre le développement physique des organes génitaux et le développement moral du sentiment sexuel. A la fin du siècle, un discours amalgamant féminisme, homosexualité, « hermaphrodisme » et infertilité se développe alors, créant une figure monstrueuse, déviante et stérile, un épouvantail contre les évolutions sociales. Affirmant qu’il n’existe que deux « vrais » sexes, la science médicale sert d’outil de régulation sociale et politique et fournit une légitimité scientifique aux arguments naturalistes des conservateurs. Julie De Ganck exposera ce discours qui peut paraître désuet mais dont la logique est encore bien souvent à l’oeuvre dans nos sociétés contemporaines comme en témoignent les virulents débats sur la « théorie du genre » sévissant en France actuellement.
· Modération: Stavroula Giannelis • Historienne
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Plénière • 16h30-18h
• Horizons et politisations
Un pied dehors, un pied dedans – Diversité des rapports à l’Etat de la militance gaie et lesbienne en Israël
Vincent Palliez · Prix Delor 2012-2013
La militance gaie et lesbienne s’est, depuis 1988, de plus en plus institutionnalisée. La décriminalisation des pratiques homosexuelles a permis une activité militante ouverte et assumée. Les militant·e·s du pays se sont également saisi de toutes les structures d’opportunités politiques existantes. Certains sont restés dans le cadre de mouvements sociaux relativement spontanés, conjoncturels, et relativement peu structurés. D’autres ont établi des structures pérennes financièrement plus ou moins dépendantes des subventions étatiques. D’autres encore ont créé au sein des partis politiques les structures permettant le traitement des questions gaies et lesbiennes. Enfin, des militant-e-s ont su se faire élire à divers postes (de conseillère municipale à député) en tant que militants de leur cause sexuelle. Si l’évolution de la situation légale des populations gaies et lesbiennes en Israël est en bonne partie due à la mobilisation d’allié-e-s au sein des institutions, il faut par ailleurs bien que des militant-e-s gaies et lesbiennes puissent s’organiser et orchestrer cette mobilisation.
Cette recherche s’appuie sur un travail de mémoire sur les structures d’opportunités politiques utilisées dans le cadre de la militance gaie et lesbienne en Israël (ULB 2013). Nous nous pencherons ici plus sur la diversité des rapports avec l’Etat qu’on trouve dans cette toute aussi diverse militance, de la confrontation à l’entrisme.
Les homosexuels en question de la Russie soviétique à la Russie d’aujourd’hui (1981-2014) : des « dissidents » sexuels ?
Arthur Clech · EHESS
Nous cherchons à décrire une généalogie des discours possibles des homosexuels de 1981 à aujourd’hui tout en remettant cette parole en perspective dans des discours publics qui font aujourd’hui, nous semble-t-il, de l’homosexuel le terroriste de la sexualité, de la famille, de la patrie et de la religion, en plus du « malade » et de l’« anormal » que l’on trouvait déjà dans les années 90. Toujours réduit·e·s à une figure menaçante, les homosexuel·le·s font question en Russie aujourd’hui comme hier en URSS sans jamais paraître constituer un « groupe social ». Afin de mettre en perspective le discours de ce que nous appelons les « dissidents sexuels », nous interrogeons de manière critique la périodisation que la législation déterminerait (dépénalisation de 1993, loi « anti-gay » de 2013) en nous fondant essentiellement sur des entretiens et des sources d’archives privées.
Cette périodisation est à questionner encore puisque nos entretiens avec les activistes LGBT nous laissent penser que la question homosexuelle est devenue une question clivante avant même la « pénalisation » partielle dont elle vient de faire l’objet. Cette loi est censée être orientée de prime abord contre les activistes LGBT. Pourtant, elle a pour le moment peu été utilisée contre eux. L’héritage soviétique semble se renouveler mais sans qu’il soit nécessaire de recourir systématiquement à des persécutions. Cette invisibilisation est comprise en termes de pacification : la violence est attribuée aux homosexuel(le)s qu’on prive de parole, de présence publique, afin de simplifier son identification à un stéréotype de terroriste sexuel. La question homosexuelle sèmerait le trouble et son évincement permettrait de nourrir le mythe d’une nation russe ressemblant à une famille sans histoire, sans conflits, sans crise avant que l’influence pernicieuse occidentale défasse le lien nationale dans les années 90. Cependant, réduire la Russie à l’autre homophobe, c’est aussi conforter en Russie le discours officiel et prétendument traditionnel, qui s’appuie aussi sur l’église orthodoxe, et selon lequel ce pays serait par essence hostile à « la démocratie sexuelle » occidentale.
Le Cameroun : un paradigme de la politisation du genre et de l’homosexualité en Afrique Postcoloniale
Patrick Awondo · IHEIDAu cours des deux dernières décennies, la question homosexuelle a pris une envergure nouvelle sur le continent Africain. Selon les contextes, les débats ont épousé des contours différents, même si les résultats en terme d’exclusion des minorités homosexuelles sont les mêmes. Ma communication reviendra sur cette émergence violente du débat public sur l’homosexualité avec un focus sur le cas du Cameroun. Mon hypothèse centrale pour lire l’irruption de la question homosexuelle est celle de la politisation du genre et de l’homosexualité ; elle suggère de considérer la montée en généralité de la problématique du genre et de la sexualité dans sa requalification en terme politique, c’est-à-dire comme des questions publiques interrogeant des intérêts et des normes communes. Il s’agit donc moins de s’arrêter sur les effets du débat que sur le processus qui y a conduit pour souligner le caractère global des situations locales.
• Modération : Bruno Selun · European Parliament Intergroup on LGBT Rights
Le Prix Delor vise à récompenser un travail de fin d’études, défendu dans toute discipline des sciences humaines et sociales ou dans les domaines des arts, de la communication et de la pédagogie, contribuant de manière originale à l’enrichissement des connaissances sur les questions et les cultures LGBTI (lesbiennes, gays, bi, trans et intersexué-e-s). L’objectif du prix est d’encourager les travaux réalisés autour de cette thématique et d’accroître leur visibilité et leur légitimité. Le jury se compose de membres de la Coordination Holebi Bruxelles et d’Arc-en-Ciel Wallonie ainsi que des représentant·e·s du monde académique de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
http://arcenciel-wallonie.be/web/acw/prix-du-memoire
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Keynotes • 18h30-19h30
·Usage des savoirs situés dans la recherche
·Transidentité: inégalités de la représentation et de la médiatisation
Karine Espineira · Université de Nice et Observatoire des Transidentités
Cornelius Castoriadis écrit dans L’institution imaginaire de la société (1975) : « Ce n’est jamais le logos que vous écoutez, c’est toujours quelqu’un, tel qu’il est, de là où il est, qui parle à ses risques et périls, mais aussi aux vôtres ». Ce propos, tel un préambule à la communication proposée souligne la responsabilité de la recherche et du chercheur-e. L’étude de la construction médiatique des transidentités a engagé à chaque ligne la responsabilité de nos écrits puisque nous ne nous plaçons pas comme témoin modeste invisible à lui-même dans la pratique, le discours et les résultats obtenus.
Les social studies of sciences montrent que « les pratiques, les résultats et les discours scientifiques ne peuvent être dissociés de leur contexte politique, culturel, social, portant des atteintes irrémédiables aux prétentions des scientifiques à l’objectivité et à l’énonciation de vérités universelles. Études de cas et de controverses révèlent que la pratique scientifique consiste non en la « découverte », mais en la « construction » par le langage et les représentations, de ce qui est appelé « les faits », « la nature ». Les résultats scientifiques ne sont pas l’exposé des faits ni la description fidèle de la nature, mais les produits de conditions historiques données » (Irène Jami, 2008).
Nous montrerons comment nous avons suivi le modèle épistémologique proposé par Donna Haraway avec les « savoirs situés » pour décrire notre propre « relation entre sujet et objet de connaissance » en vue d’une recherche responsable, et portant la critique sur « l’homme de science » comme « témoin modeste » en tant que produit d’une construction historique déterminée. Nous donnerons dans un deuxième temps les tendances mises en lumière par cette recherche marquée par les apports des études de genre, les études culturelles et les épistémologies féministes, et qui trouve encore à se développer avec les apports des approches intersectionnelles.
Nous nous trouvons bien face à un modèle culturel et médiatique des transidentités de type hégémonique et d’autant plus valorisé qu’il contient « aux frontières » un modèle plus subversif et source de « paniques de genre ». Étudier les représentations médiatiques c’est aussi « penser le genre » comme l’un des effets de pouvoir et de domination qui structurent les relations entre individus et sociétés.
• Modération : Londé Ngosso · Genres Pluriels
L’Observatoire des Transidentités (ODT) est un site indépendant d’information et d’analyse sur les questions trans, inter et les questions de genre. Outre l’équipe permanente, il s’appuie sur un réseau d’acteurs-actrices de terrain, d’associations-partenaires et d’universitaires. L’Observatoire cherche à établir un état des lieux des questions trans et inter et publie des analyses. Son action s’inscrit dans le cadre d’un travail de terrain et d’analyses socioculturelles. Indépendant, il cherche à engager le débat le plus ouvert possible entre différentes sensibilités. Il a aussi vocation à réunir des approches scientifiques de disciplines distinctes.